LE COVIDE DOULOUREUX

Le fait d’avoir vécu les menaces du Covid pendant plusieurs mois, avec l’Espagne comme l’un des pays où le nombre de décès est le plus élevé au monde, était tellement alarmant et nous rendait presque paranoïaques par moments. C’est ainsi que j’ai vécu ces jours-là, soit à l’université, soit entre les routes pour rentrer chez moi à Madrid. Il s’agissait d’une expérience très difficile en matière d’hygiène, de soins aux autres et de maintien de la distance avec les amis et même les membres de notre propre communauté.

Je pensais qu’une telle expérience s’atténuerait à mon retour dans mon pays, sachant qu’à l’époque, nous avions encore très peu de cas signalés. À ma grande surprise, alors que je voyageais pour retourner dans mon pays natal, le protocole sanitaire aux Philippines était plus strict que celui de mon lieu d’embarquement. 6 jours de quarantaine à mon arrivée et 8 jours supplémentaires dans ma ville de destination. En outre, les rapports n’étaient que des chiffres, quelle que soit l’inquiétude ou l’intensité avec laquelle nous déplorions la situation dans le monde.

Cependant, au cours de mes deux mois de séjour chez ma mère dans ma ville natale, j’ai été plongée dans une intense préoccupation pour ma communauté et celle de ma famille. Ce n’est que lorsque les figures ci-dessus sont devenues une partie de moi, que ma sœur aînée est l’une d’entre elles. Sa belle-mère a perdu son combat contre le virus ce matin. Aux côtés de ma sœur, il y a son beau-père, sa belle-sœur d’une quarantaine d’années et une nièce d’environ sept ans.

Je suis allée à l’église aujourd’hui pour offrir une messe pour les morts, pour prier pour la guérison de ma sœur et des personnes touchées par le virus. Très opportun, l’Évangile du jour (Mt 8, 23-27) raconte l’inquiétude des disciples devant le fait que Jésus a apparemment dormi alors qu’il était ballotté par la tempête dans la mer. L’inquiétude des disciples pour sa sécurité résonne avec notre condition actuelle et l’expérience terrible que nous faisons des coups du Covid dans notre ville, dans notre famille. Jésus semblait dormir au milieu de nos cris, de nos appels à l’aide et de son aide pour guérir nos proches. Parfois, nous avions envie de demander un miracle au Seigneur pour être à la merci de notre plaidoyer.

Je me suis rendue compte de la dureté du cœur humain, cela me fait réaliser les qualités du doute que nous avons de Sa présence, pas loin de l’attitude de Son propre disciple Thomas juste après Sa résurrection. Si souvent, nous voulons des preuves de son action, exigeant parfois ses miracles au lieu d’écouter et d’obéir à sa volonté, à sa façon de voir à travers ce que nous qualifions de “tempête”. Nous savons, grâce au catéchisme, que ces temps d’épreuve sont toujours accompagnés, en de nombreuses occasions, d’une abondance de Sa grâce pour nous permettre de traverser les eaux. En fait, nous sommes continuellement invités à le voir à travers la tempête, à ne pas douter de sa douce présence, de son puissant silence.

Ces jours-ci (comme il y a trois jours), en tant que famille assaillie par les doutes et les angoisses, nous gardons les yeux rivés sur les messages et les appels des mises à jour de notre sœur. Cependant, au milieu de cette “tempête”, nous gardons les mains croisées et faisons confiance au Seigneur, jour après jour, pour qu’elle aille mieux. Nos gémissements ont continué lorsqu’elle nous a dit qu’elle serait emmenée dans un établissement Covid pour l’isoler, elle et sa belle-famille, pour la tenir éloignée de nous, son mari et son fils. C’est une véritable douleur de séparation que Covid-19 accumule dans le monde actuel. C’est un message direct à nos cœurs sur les aspects anti-vie, anti-humain, anti-communauté de ce virus géant de la désolation. Elle menace tous les aspects des relations entre les êtres humains, créant la dévastation, la solitude et l’angoisse pour toutes les personnes, les familles et les travailleurs de la santé affectés dans le monde. De plus, elle laisse tout le monde dans l’incertitude d’un avenir, de ce qui se trouve au-delà de la courbe.

C’est un appel fort à apprendre à faire confiance et à faire mieux dans notre “aujourd’hui” et pour le reste de nos jours. Nous ne pouvons pas vivre en autarcie, nous sommes une toile de vie imbriquée. Le mieux que l’on puisse faire est de se rendre heureux pendant qu’il en est encore temps. Tout comme les enfants, qui savent mieux que quiconque se réjouir et plonger librement, parce qu’ils savent que leur confiance et leur protection sont assurées par leurs parents et que leur joie est en sécurité parmi leurs amis.

C’est ainsi que ces expériences complexes de la vie humaine pendant la pandémie touchent les recoins les plus profonds de nos cœurs, nous amènent à nous demander où est notre trésor, à qui nous faisons confiance, pour qui nous travaillons et pour qui nous vivons. Elle nous pousse à nous interroger sur notre existence, son essence et son but, jusqu’à nous demander pourquoi nous faisons ce que nous faisons en ce moment.

Où ancrer nos vies fragiles, le trésor le plus menacé de cette planète ?

Nini Rebollos

Compartir esta publicacion